Révélations de Linéaires sur les tests du groupement
Petit format : Leclerc multiplie les expériences
« Leclerc recommence à s’intéresser au supermarché. » De l’aveu même d’un baron du mouvement, l’enseigne amorce en douceur ce qui ressemble bien à un virage stratégique. Pendant longtemps, Michel-Edouard Leclerc a promis que les points de vente regroupés derrière sa bannière avaient vocation, à terme, à ne compter que des hypermarchés. Hormis, sans doute, quelques cas particuliers de magasins ne souhaitant pas quitter des centres-villes intéressants.
Seulement voilà. Aujourd’hui, les quatre-cinquièmes du parc ont déjà franchi le cap des 2 500 m². Selon les statistiques exclusives de Linéaires (voir n°199), les CDEC refusent au groupement presque une demande de mètres carrés sur deux. Et dans un paysage commercial à saturation, créer ex-nihilo des hypermarchés relève de la gageure. En outre, Leclerc doit aussi pouvoir proposer autre chose aux adhérents potentiels que d'investir les mises de fonds faramineuses nécessaires à l’ouverture ou au rachat d’une très grande surface.
« 500 bonshommes, 500 idées »
Bref, le groupement d’indépendants a toutes les raisons, effectivement, de s’intéresser au supermarché. En toute discrétion, des expériences, assez différentes les unes des autres, sont menées depuis un certain temps déjà par quelques adhérents. « Chez nous, il y a 500 bonshommes qui ont 500 idées » résume l’un d’eux, cherchant à modérer la portée de son propre test. Mais c’est bien là la force du mouvement : les initiatives individuelles sont encouragées, sans vraiment revêtir un caractère officiel et les bonnes idées, en général, ne restent pas sans suite.
En exclusivité, voici donc cinq magasins, rattachés plus ou moins directement à l’enseigne Leclerc, qui sont chacun des prototypes à part entière. Des supermarchés (et une supérette) dont nous avons pu nous procurer des photographies.
En gros, deux tendances fédèrent les concepts aujourd’hui à l'étude : des petits Leclerc plutôt discount d'un côté et d'autres qui jouent plutôt la proximité. A l'automne dernier, par exemple, la presse s'est fait l'écho de l'ouverture à Wattrelos (non loin de Lille) d'un magasin dépouillé, laissant la part belle aux MDD et premiers prix de l'enseigne.
Façade passablement défraîchie
Dans la même veine, Linéaires avait déjà pointé en 2003 l'exploitation à Saint-Herblain, dans la banlieue nantaise, d'un supermarché arborant le logo de l'enseigne (sans l'intitulé « E. Leclerc »). Le local, à la façade passablement défraîchie, est en fait l'ancien emplacement d'un hypermarché transféré à deux pas. Le bâtiment comme le parking, vieillots et trop grands pour le magasin, confèrent pourtant à ce point de vente atypique le côté « circuit parallèle » qui a contribué au succès du hard-discount.
L'ouverture du magasin de Basse-Goulaine, de l'autre côté de Nantes (l'adhérent est différent), est encore plus « opportuniste ». Le Relais des Mousquetaires qui animait le centre du bourg venant de fermer, la mairie et le propriétaire du Leclerc en périphérie se sont mis d'accord pour redonner vie au petit commerce. La supérette a rouvert, à peine décorée et sans enseigne (ni même de lecteur de codes à barres à l'unique caisse !) et ne propose quasiment que des produits signés Marque Repère. Du bricolage, à coup sûr, bien plus qu'une stratégie délibérée de la part du groupement. N'empêche. L'air de ne pas y toucher, Leclerc est à même de jauger les performances d'une « échoppe » Marque Repère en centre-ville.
Le plus petit Leclerc de France
D'autres prototypes sont quant à eux beaucoup plus typés « supermarchés ». Pas de dramatisation à outrance des signatures les plus économiques de l'enseigne, pas de dépouillement excessif des linéaires : les magasins d'Arcachon (en Gironde) et de Figeac (dans le Lot) sont plutôt des Leclerc en modèle réduit, avec une identité propre.
A Arcachon, le supermarché cumule les spécificités : avec 980 m² de surface, il était déjà le plus petit « vrai » Leclerc de France. Aujourd'hui, il peut se vanter d'avoir adopté une implantation qui aurait été, selon le personnel du magasin, validée au niveau national par l'enseigne. Le concept ? Une allée centrale toute en longueur, avec de part et d'autre de vastes corners délimitant des univers produits.
Chaque espace, ouvert sur l'allée, est fermé sur les trois autres côtés par des rayons montant jusqu'au plafond. En son milieu, une gondole basse impose un parcours en U. Le gain en mètres linéaires est patent, sans que le magasin soit pour autant étouffant. Les gondoles basses aèrent les perspectives et l'éclairage, qui a bénéficié d'un gros investissement, est particulièrement lumineux. Le gain en chiffre d'affaires depuis la nouvelle implantation, non communiqué par Leclerc, serait conséquent.
Compétitif pour du centre-ville
A Figeac, le supermarché n'a pas eu l'heure d'une validation officielle. Historiquement, ce petit magasin de centre-ville a été repris en 1993, de la même manière qu'à Basse-Goulaine (à la fermeture d'un Prisunic). L'adhérent a changé en 2002, le point de vente refait à neuf, mais toujours sans la vocation d'intégrer le parc officiel du groupement (pas d'enseigne Leclerc sur le fronton). La filiation au mouvement est pourtant patente : sans mise en scène discount, les MDD « maison » sont très bien exposées dans les rayons, Nos Régions ont du Talent bénéficiant même d'un espace cossu dès l'entrée du magasin. Les prix, d'ailleurs, sont rigoureusement les mêmes que dans le « vrai » Leclerc de la périphérie (plutôt compétitif pour du centre-ville).
Hormis sans doute Arcachon, tous ces magasins n'engagent pour l'heure que leurs propriétaires. Ces initiatives n'en viennent pas moins enrichir des réflexions qui se multiplient au sein du groupement. Il fait peu de doutes que Leclerc saisira désormais les opportunités de se constituer un parc de supermarchés à part entière. Déjà, fin 2004, deux créations de magasins Leclerc ont été autorisées, en Haute-Savoie et dans les Landes. Le premier sur une surface de 1 500 m², le second sur 1 235 m². Un début.