Reportage exclusif
Avec Fredi, le hard met le cap au frais
C’est en Alsace, à Drusenheim, à 25 km au nord de Strasbourg, que le groupe Auchan teste, depuis le 30 mars, une nouvelle enseigne, « Fredi », contraction de « frais et discount ». Sur un peu moins de 300 m², le magasin propose une offre résolument discount et des aménagements intérieurs directement inspirés de la formule allemande qui a fait le succès de Aldi et Lidl.
Fredi se distingue néanmoins avec une entrée qui se fait par les produits frais et en particulier les fruits et légumes (60 références, vendues à la pièce ou à peser en caisse). Un parti pris qui donne une perspective visuelle nettement plus accueillante que celle que l’on trouve chez nombre de hard-discounters. Clairement, les concepteurs ont fait des efforts pour atténuer l’impression d’austérité. Le logo, un petit œil souriant sur fond vert et rouge, est assez sympathique. A l’intérieur du magasin, une frise rouge vient habiller le haut des murs. Le sol, lui, est laissé en béton. Il a néanmoins été recouvert d’un vernis pour faciliter le nettoyage. La présentation des produits associe les palettes au sol et les tablettes sur trois niveaux. Les marchandises sont mises en rayon dans leurs cartons d’origine. Mais contrairement à la tendance actuelle des maxi-discompteurs allemands, Fredi ne propose pas d’articles de bazar.
Les produits Pouce (entrée de gamme d’Auchan et Atac) constituent 90 % de l’assortiment (600 réf. de frais et 400 réf. d’épicerie & liquides). On trouve également quelques premiers prix signés Mennel (ultra frais), Chamblay (charcuterie Pierre Schmidt) ou La Colombe (pâtes « trois œufs » Heimburger). Les vrais doublons sont rares, seulement sur l’emmental et le bordeaux. En revanche, là où Aldi, par exemple, ne propose qu’un seul calibre de haricots verts en conserve, Fredi en a trois (fins, très fins et extra fins). Pour les animaux de compagnie, l’assortiment comprend de la nourriture pour poissons, des graines pour oiseaux, deux désodorisants, des sacs de foin, de litière, etc.
Alors que généralement, les assortiments des hard-discounters sont très standardisés, celui de Fredi a manifestement été adapté au contexte local. Le magasin propose ainsi des pots de garniture pour tartes flambées, une impressionnante gamme de fécules, chapelure et autres tapioca, deux marques de pâtes, etc. Le magasin est approvisionné par l’entrepôt Atac , il a donc accès à l’intégralité du cadencier de la centrale. A voir si ce « marketing de site » sera toujours possible le jour où le groupe disposera d’un nombre suffisant de points de vente et qu’il pourra mettre en place une logistique dédiée à cette enseigne discount.
En matière de prix aussi, hormis les produits livrés pré-marqués par l’entrepôt, le point de vente alsacien bénéficie d’une certaine marge de manœuvre. Elle lui permet de se décrocher de quelques points par rapport aux produits Pouce vendus chez Auchan ou Atac. Linéaires a comparé les prix de Fredi avec ceux de ses deux concurrents, le supermarché Maxi, situé dans le même village, et le Ed du bourg voisin (Herlisheim). Face à l’offre de premiers prix de son concurrent coopératif, le nouveau venu est nettement plus compétitif. Vis-à-vis de l’enseigne du groupe Carrefour, l’écart est déjà beaucoup plus ténu. Reste que l’offre de Ed, bien que globalement deux à trois fois plus large que celle de Fredi, ne traduit pas le même souci de coller à la demande locale. Un exemple révélateur, Ed ne propose pas de crème fraîche fluide, un produit pourtant incontournable sur les bords du Rhin. Chez Fredi, à en juger par la place accordée à la référence Alsace Lait, ce doit être l’une des meilleures rotations du magasin. Il faut dire que le flacon 50 cl est affiché à 1,10 €, soit 16 centimes de moins que chez Maxi.
Le hard-discounter Fredi se distingue également par ses services : un petit espace - 50 % pour les DLC courtes ; chèques et cartes bleues acceptés sans montant minimum. Le magasin est par ailleurs équipé d’un petit four qui lui permet de cuire du pain sur place, deux à trois fois par jour selon les volumes vendus. Moins visible des clients : les fruits et légumes qui le nécessitent sont rentrés chaque soir en chambre froide.
Autant le groupe ne devrait pas avoir trop de difficultés à valider le concept marchand de Fredi. En revanche, l’intégrer dans un modèle économique viable à l’échelle d’une chaîne peut s’avérer plus délicat. En effet, contrairement aux autres enseignes de hard-discount, très centralisées, avec Fredi, c’est le magasin qui pilote son assortiment, ses prix et donc sa rentabilité. Si le test de Drusenheim est validé, il restera alors à imaginer une organisation en amont qui permette de dupliquer Fredi avec succès. Pour « saturer » un entrepôt dans de bonnes conditions en hard-discount, on a coutume de dire qu’il faut 50 magasins dans un rayon de 250 kilomètres. Un deuxième Fredi alsacien ouvrira en septembre.