Loïc Le Moaligou, directeur marketing d’Houra (Cora)
«Nous visons un cash-flow positif dès 2004»
Linéaires : Votre Pdg, Pierre Bouriez, a affirmé qu’Houra était presque à l’équilibre sur 2003. Pouvez-vous nous donner plus de précisions ?
Loïc Le Moaligou : Notre chiffre d’affaires et notre résultat d’exploitation sont des informations confidentielles. En revanche, je puis vous indiquer que nos ventes ont augmenté de 10 % l’année dernière. Le panier moyen a progressé de 15 % et le nombre de clients de 10 %. Le nombre de clients fidèles, c’est-à-dire ceux passant une commande au moins toutes les six semaines, a aussi sensiblement augmenté. Ils représentent aujourd’hui 40 % de notre clientèle.
Quels sont vos objectifs pour 2004 ?
L. L.-M. : Nous visons clairement un cash-flow positif avec une hausse du chiffre d’affaires de 20 %.
Sur quels éléments vous basez-vous pour formuler ces prévisions ?
L. L.-M. : Les leviers de croissance sont nombreux. J’en citerai quatre principaux : l’augmentation du panier moyen, l’accroissement du nombre de commandes grâce à la fidélisation de la clientèle, la réduction des coûts d’exploitation et le recrutement de nouveaux prospects par des opérations de marketing direct on-line ou off-line.
Le modèle économique du cybermarché reste handicapé par des frais de préparation et d’acheminement des commandes bien supérieurs aux frais de livraison facturés aux clients. Avez-vous trouvé la formule pour résoudre cette difficile équation ?
L. L.-M. : Oui. La réduction de nos pertes en 2003 s’explique en grande partie par la baisse de nos coûts logistiques. Depuis septembre dernier, nous avons notamment changé de mode de préparation des commandes. Auparavant, les préparateurs étaient spécialisés par atelier (produits frais, liquides, épicerie, non-al, etc.) et ne traitaient qu’une seule commande à la fois. Aujourd’hui, nous avons mis en place un chariot permettant de préparer six colis en même temps. Avec ce système, le nombre de lignes de produits préparés à l’heure est en passe de doubler, d’où un gain de productivité non négligeable.
Et pour le « dernier kilomètre » ?
L. L.-M. : Nous travaillons étroitement avec le prestataire assurant nos livraisons afin d’optimiser les tournées. J’ajoute qu’au fil du temps, l’augmentation mécanique du nombre de commandes nous permettra de négocier de meilleures conditions tarifaires.
Il y a un peu plus de deux ans, Houra se retirait de 63 départements, faute de clients. Envisagez-vous à nouveau d’élargir votre couverture de l’Hexagone ?
L. L.-M. : Non, c’est encore trop tôt. Le nombre d’acheteurs en ligne reste trop faible en dehors des zones que nous couvrons déjà. En outre, nous aurions des difficultés à trouver des prestataires capables de livrer efficacement des particuliers sur rendez-vous.
Contrairement à ses principaux concurrents, Houra ne propose toujours pas de surgelés. Pourquoi ?
L. L.-M. : A notre connaissance, il n’existe pas de solution logistique permettant de proposer des produits surgelés tout en restant dans une modèle économique acceptable. La demande reste aussi relativement faible : moins de 8 % de nos clients nous réclament des produits surgelés. Aujourd’hui le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Les cybermarchés se sont trouvé un nouveau cheval de bataille : les techniques de fidélisation. Quels sont les actions d’Houra en la matière ?
L. L.-M. : Nous nous sommes fixé pour objectif principal d’offrir une qualité de service optimale. Il ne sert à rien d’offrir des produits ou un bouquet de fleurs aux clients si les produits n’arrivent pas à l’heure ou s’il manque des références. Chez Houra, 97 % des commandes sont livrées dans les délais impartis et 96 % des colis sont complets. Nous nous efforçons aussi d’améliorer en permanence la phase de la préparation de la commande sur le site. Les recherches de produits n’ayant pas abouti sont soigneusement analysées, soit pour perfectionner le fonctionnement du moteur de recherche, soit pour référencer de nouveaux produits.
Telemarket et Auchandirect se montrent plutôt généreux avec leurs formules de réduction des frais de livraison pour les clients les plus fidèles. N’êtes-vous pas en retrait sur ce point ?
L. L.-M. : Non. Seulement nous ne voulons pas faire n’importe quoi. Réduire de moitié le prix de la livraison sans imposer un montant minimum pour la commande, c’est de la folie. Cela revient à accepter sciemment de générer d’énormes pertes. Notre offre actuelle (50 % de réduction sur les frais de livraison, dès la seconde commande passée dans les trente jours et pour un montant minimum de 120 €, NDLR) n’est qu’un début. Nous proposerons d’ici la mi-février une formule de fidélisation indexée sur deux paramètres : le montant et la fréquence de la commande.
L’ouverture de Chronodrive.com (Auchan) relance le débat sur l’intérêt des points de livraison. Quel est votre sentiment ?
L. L.-M. : Je ne crois pas du tout à la viabilité économique des points de livraison tels qu’ils existent sur Paris et sa région. Pour les clients ce n’est qu’un ersatz de service et les coûts d’exploitation sont bien trop lourds. La méthode choisie par Auchan dans le Nord me semble plus astucieuse, le point de livraison étant à proximité du réseau de magasins traditionnels.
Envisagez-vous de tester le picking (préparation des commandes en magasin) ?
L. L.-M. : Non. Nous n’y croyons pas davantage. Le site Internet devant refléter à tout moment l’état du stock disponible dans le ou les magasins concernés, c’est tout simplement ingérable sur le plan logistique. Sans oublier la lourdeur de la phase de préparation de commande en surface de vente. De toutes façons, 65 % de nos clients se situent en Ile de France et Cora est peu présent sur cette zone.
Repères : Houra en bref
- Création en janvier 2000.
- 50 000 références alimentaires et non-alimentaires.
- Nombre de clients : environ 150 000.
- Livraison dans 26 départements dont 9 en Ile de France.
- Frais de livraison : de 11,95 € à 13,95 € selon les zones.
- Poids des produits Cora sur les produits frais : 17 % en valeur (lait inclus).