Les deux enseignes en bataille sous l’indice 98

Linéairesprix : Carrefour à couteaux tirés avec Leclerc

14 février 2005 - Florent Vacheret

Coup de tonnerre. Leclerc a toujours été intouchable s'agissant des prix. Depuis 1998, 10 vagues successives de relevés de prix réalisés par Linéaires l'ont clairement attesté. Mais les temps changent... Pour la première fois, Carrefour est venu disputer la suprématie de l'indépendant, au second semestre 2004. Pour un dixième de point (0,1 %), l'enseigne dirigée par Daniel Bernard détrône Leclerc. Un symbole fort, même si le panier Linéaires ne compte que 100 produits de grandes marques, « majors parmi les majors » de l'alimentaire, sur lesquels les écarts sont par nature minimes.
Ce résultat n'est en fait qu'une demi-surprise. Carrefour avait clairement annoncé la couleur dès le printemps 2004. « Nous serons premiers en prix sur chacun de nos sites. J'y veillerai personnellement », déclarait alors Bernard Dunand, le directeur général de Carrefour France. Mais Carrefour nous avait habitués à pareil discours sans que les faits ne s'ensuivent toujours... Cette fois promesse a été tenue. Anonyme, un des cadres de l’enseigne décode. « Tout le monde croyait que nous allions relâché l'effort à l'approche de la fin de l'année, comme à chaque fois qu'il faut « sortir » le résultat promis aux actionnaires. Mais avec l'avertissement sur les résultats en octobre, la pression ne s'est reportée que sur le chiffre d'affaires. Donc sur les prix.» Et l'enseigne n'a pas lésiné sur les moyens, quitte à jouer parfois avec les limites de la loi Galland.

Carrefour « particulièrement agressif »

« C'est un scandale, Carrefour a vendu à perte plusieurs centaines de produits durant l'automne, alors même qu'on venait de nous demander d'arrêter d’en faire autant », grommelle un adhérent Leclerc breton, réputé pour ses indices prix inférieurs à 95... « De façon générale, mais dans l'Ouest en particulier, Carrefour s'est montré particulièrement agressif ces derniers mois», confirme un spécialiste des prix dans une enseigne concurrente. A titre d'illustration, Carrefour a vendu le Snacky de Belin 6,1 % moins cher que la moyenne nationale au second semestre 2004 (0,59 euros en moyenne et 0,55 € pour les magasins les plus performants). Idem sur la bouteille Grandlait 1,5 l de Candia, décrochée de 7,2 % face à la concurrence ou les 10 Knakis Herta vendus 6,2 % moins cher.
L’effort prix réalisé par Carrefour est bien réel. Gagner un point d’indice en partant de 99 est autrement plus difficile qu’en partant de 102… Pour compléter le palmarès « carrefourien », Champion revient en parallèle à des niveaux plus dignes de son statut de numéro deux national du supermarché. Il repasse sous la barre des 100 en gagnant un point. Avec un profil assez comparable à celui de Champion, Cora revient lui aussi dans le club des enseignes inférieures à la moyenne. Cela ne fait pas pour autant des hypers du groupe Louis Delhaize des foudres de guerre dans leur catégorie : tous les concurrents du format hyper se situent sous l’indice 99.

Intermarché se relance

Le dernier bon point va à Intermarché (indice 98,9, - 0,7 pt), pour qui l’année 2004 restera comme celle du retour aux vrais prix bas, après le relatif flottement de la période 2002-2003. Les Mousquetaires ont tiré clairement profit de leur opération de rentrée « les 1 000 produits les moins chers de France », grâce, une fois encore, à la liberté qu’ils se sont octroyée vis-à-vis des seuils de revente à perte ! Au-delà de sa dimension anecdotique, cet épisode témoigne de la détermination de la nouvelle direction du groupement à retrouver son ancrage discount historique. L’étiquetage systématique des produits à marques propres, depuis novembre, pour obliger les adhérents à respecter les PVC recommandés participe de la même logique volontariste.
Les baisses plutôt « violentes » observées chez Carrefour, Cora, Champion et Intermarché font, mécaniquement, remonter le reste de la concurrence d’un cran : 8 des 12 enseignes étudiées voient leur indice se dégrader.

Auchan déçoit

Et Leclerc n’est pas le mieux loti de tous, avec une hausse de 0,5 point. La contre-performance reste malgré tout relative, s’agissant de la seule enseigne inscrite pour la dixième vague consécutive sous la barre des 98 ! Difficile d'être sévère également avec Géant qui, bien qu'en léger recul, confirme ses bonnes dispositions en prenant place sur le podium pour la deuxième vague consécutive. On n'attendait pas le groupe Casino à pareille fête... Le bilan s'avère plus critique pour le groupe Auchan. L'enseigne d'hypers passe de la deuxième à la cinquième place en l'espace d'un semestre, avec un indice en nette dégradation (+ 0,8 pt). Les supers Atac connaissent un sort très comparable (+ 1 point, de la huitième à la dixième place). Ce faisant Atac retrouve le niveau qui a longtemps été le sien (entre 2000 et 2002), après une embellie passagère en 2003, dans le voisinage des supermarchés Casino et Match. Pas de quoi pavoiser...

Méthodologie :

Entre juillet et décembre 2004, l’équipe de Linéaires a visité 165 magasins dans toute la France, relevant les prix de 102 références alimentaires, y compris liquides. 94 sont des produits de grande marque, leader sur leur rayon. Le panier comprend également 7 premiers prix basiques : farine T 55, poulet PAC, litre de lait, etc., ainsi que la symbolique baguette de pain. L'effet lié à la baisse des prix des marques suite à l'application du l'accord Sarkozy au 1er septembre a été isolé, afin de ne pas introduire un biais dans le calcul des indices des enseignes.

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