Les ventes d’Auchan fondent d’un tiers en 2021
Auchan Retail publie un chiffre d’affaires en recul de 33% sur le premier semestre 2021. La cession de la Chine explique l’essentiel de cette baisse, mais le distributeur perd aussi plus de terrain que prévu en France.
La phrase est surprenante. En présentant ses résultats pour le premier semestre 2021, ELO, la holding d’Auchan, justifie ses performances en recul par une "forte exposition au format hypermarché". Assumant de façon de plus en plus transparente, année après année, les difficultés que pose une dépendance trop marquée aux grands hypers et s’alarmant notamment qu’ils soient désertés par les jeunes générations.
Auchan s’était renfloué l’an dernier en cédant ses activités en Chine. En conséquence, le chiffre d’affaires semestriel recule de 33%. Mais ses marges se dégradent encore plus vite (signe que la Chine était largement rentable). Le résultat d’exploitation courant, à -66%, tombe à 160 millions d’euros. Soit seulement 1,1% du CA, contre 2,1% un an plus tôt.
Derrière cette baisse de résultats se cache aussi une bonne nouvelle, insiste le distributeur. La rentabilité des activités poursuivies, certes faible, s’améliore sous l’effet du plan d’économies baptisé "Renaissance". En excluant de la comparaison les actifs cédés, l’ebitda d’Auchan (l’équivalent du résultat d’exploitation avant dotations aux amortissements) progresse de 3,7%. La France est même à +25%.
Mais tout n’est pas rose pour Auchan, loin de là, dans l’Hexagone. Le chiffre d’affaires recule de près de 3% sur le semestre, alors que l’historique en 2020 n’était pas exceptionnel (+0,8%). À magasins comparables, le CA cède plus de 4% (évolution hors carburants, non corrigée des effets calendaires).
12% du CA en ligne
Selon des informations internes auxquelles Linéaires a eu accès, les ventes sont significativement en dessous des objectifs que l’enseigne s’était fixés.
En magasins, le CA reculerait d’environ -5% en PGC-frais LS, de -2% en trad et de -5% en non alimentaire. Les ventes en ligne sont également en légère baisse (sur deux ans, la progression cumulée reste de +31% pour atteindre 12% du CA de l’enseigne, Chronodrive inclus).
Auchan estime avoir subi de plein fouet les effets de la crise sanitaire et des restrictions sur les grands centres commerciaux. À eux seuls, 10 hypermarchés expliquent 40% de la baisse des ventes d’Auchan en France, ayant vu leur trafic s’effondrer. À l’image de Roncq (59) qui a perdu sa clientèle frontalière, de La Défense (92) à cause du télétravail ou de Marne-la-Vallée (77), pénalisé par la fermeture de Disneyland.
L'anniversaire de l'enseigne
Les 60 ans de l’enseigne, lancés en juillet en France, ont de la même manière connu un coup d’arrêt brutal. "Emmanuel Macron a annoncé à la télévision l’arrivée du pass sanitaire dans les grands centres commerciaux, alors qu’on n’y a jamais vu un seul cluster, se désole un cadre d’Auchan. Du jour au lendemain, les clients ont arrêté de venir."
Pour se relancer et attirer les foyers qui boudent l’enseigne, Auchan multiplie les ouvertures de drives piéton en centre-ville. Avec 55 unités fin juin et même 71 à fin août, le parc est déjà plus fourni que celui des magasins de proximité, que le distributeur n’a jamais réussi à faire décoller.
L’objectif ambitieux de 300 drives piéton opérationnels fin 2021 ne sera pas atteint, mais 200 baux sont déjà signés, assure-t-on chez Auchan.
Le distributeur a également démarré un test de "quick commerce" dans la banlieue de Bordeaux. Le magasin Auchan Supermarché de Talence Gambetta, situé dans un quartier étudiant, assure la livraison de courses en 15 minutes sur un assortiment restreint.
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Dividende exceptionnel
À l’échelle de ELO, qui possède aussi la branche immobilière (rebaptisée New Immo Holding) et 49,9% de la banque Oney, le résultat net semestriel est à -22 M€, contre +106 M€ au S1 2020.
L’an dernier, cela dit, tous les bénéfices étaient partis aux mains des actionnaires minoritaires des filiales : la "part du groupe" était finalement une perte nette de -77 M€. En 2021, les minoritaires des filiales restantes sont moins généreusement servis (1 M€). La perte nette "part du groupe" se retrouve à -24 M€.
Malgré ces comptes dans le rouge, les actionnaires d’ELO ont voté le 24 août le versement d’un dividende exceptionnel de 750 M€, lié aux cessions de la Chine et d’Oney Bank. Cela faisait trois ans qu’ELO n’accordait plus de dividende à la famille Mulliez.