Le tribunal de commerce laisse une chance à Gastt, le repreneur polonais de huit Dia

15 septembre 2016 - B. Merlaud

Le tribunal de commerce laisse une chance à Gastt, le repreneur polonais de huit Dia

Ce 15 septembre, le tribunal de commerce de Paris a placé la société Gastt en redressement judiciaire.

Le projet de création d'une nouvelle enseigne a convaincu les juges de ne pas liquider d'emblée la société, même si les salariés des huit Dia repris n'ont pas été payés depuis deux mois.

Adam Kuzmicz, le dirigeant polonais de Gastt, avait noué un accord avec Carrefour prévoyant le rachat de 37 magasins Dia. Ce parc devait adopter l'enseigne Okey, un nouveau concept original de magasins spécialistes du frais (voir ci-dessous).

Une première vente de huit sites a été bouclée en mai 2016, dans des zones où l'Autorité de la concurrence imposait des cessions à Carrefour (pour cause de positions dominantes nées du rachat de Dia France en 2014).

Le dossier, comme c'est la procédure, nécessitait un audit indépendant du repreneur et de son projet. Cette évaluation a donné satisfaction à l'Autorité de la concurrence, qui a validé la transaction.

Promesses sans cesse repoussées

Or, depuis juillet, Adam Kuzmicz ne verse plus de salaire à ses nouveaux employés. Interrogé par Linéaires fin août, il s'est défendu d'être un patron fantôme en rappelant que la paie de juin, elle, avait bien été réglée et que sa mutuelle était même "plus avantageuse que celle de Dia".

Les fonds qu'il attendait, expliquait-il, étaient restés bloqués en Allemagne par une procédure en cours. Sur le point de trouver une solution de remplacement, il estimait pouvoir régulariser la situation des salariés d'ici à la fin août.

Mais à la mi-septembre, les 47 employés des huit magasins Dia repris n'ont toujours pas reçu un centime et sont excédés des promesses sans cesse repoussées de leur employeur.

Embarrassé par la situation, Carrefour a d'ailleurs décidé de rompre l'accord passé avec Gastt sur la trentaine de Dia non encore vendus, pour lesquels il cherche d'autres repreneurs.

Prochaine échéance le 6 octobre

Le jugement du tribunal de commerce de Paris est une déception pour les salariés, qui espéraient la liquidation définitive de Gastt. Si la procédure de redressement judiciaire va permettre de débloquer des aides qui remplaceront les salaires non versés, ils restent employés par la société et ne sont, par exemple, pas libres de travailler ailleurs.

Leur avocate a expliqué à l'AFP que le tribunal avait "laissé sa chance au repreneur en considérant qu'il s'agissait d'un accident". Le projet défendu par Adam Kuzmicz a donc été jugé crédible, de même que ses chances de pouvoir le financer.

Le délai laissé à l'homme d'affaires polonais, néanmoins, est court. Il a jusqu'au 6 octobre pour se remettre en fonds. Passé cette date, la liquidation de Gastt pourrait cette fois être prononcée.

Okey, une franchise à mi-chemin entre Grand Frais et un magasin de producteurs

Pensé pour des surfaces de 800 à 1200 mètres carrés, le concept Okey est original. Les magasins doivent être repris par des franchisés, mais les rayons traditionnels (à commencer par la boucherie et les fruits et légumes) seront laissés en concession à des structures spécialisées.

"Nous allons créer pour chacun de ces rayons des coopératives dans lesquelles vont entrer des opérateurs de la filière, annonce Adam Kuzmicz, le président de Gastt. Pour la boucherie, par exemple, des éleveurs, des abattoirs et des transformateurs seront actionnaires."

Ces coopératives géreront au plus près les rayons trad d'Okey, avec une logique d'approvisionnement en circuit court et des professionnels employés en direct (ils ne seront pas salariés par le franchisé mais par la coopérative).

Gastt prévoit ainsi de former chaque année de nombreux apprentis aux métiers de bouche. Des apprentis qui par la suite pourront gérer des rayons d'Okey ou monter un commerce spécialisé fonctionnant comme le "satellite" d'un magasin. "Nous accompagnerons par exemple des jeunes pour ouvrir des petites boucheries dans les villages aux alentours d'un magasin Okey", prévoit Adam Kuzmicz, qui se voit comme un acteur de la "renaissance du commerce traditionnel".

L'ouverture du premier magasin Okey, initialement programmée avant l'été à Rambouillet (78), a été repoussée ("le site nous sert de laboratoire"). Une première vague de huit magasins de la région parisienne, annonçait l'entrepreneur polonais, devait être inaugurée en septembre.

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