Frais d'Ici : un modèle étonnant, des ambitions toujours là
Le groupe InVivo a inauguré son deuxième magasin pilote Frais d'ici près de Dijon. Consacré aux produits en circuit court, le point de vente est porté par des coopératives locales… même si elles n'ont rien à y vendre en direct. Un nouveau "capitalisme agricole", donc, qui s'assortit de solides ambitions : construire un parc, à moyen terme, d'une centaine d'unités.
Le premier Frais d'Ici a vu le jour à Portet-sur-Garonne, dans la banlieue de Toulouse, en octobre 2014 : 550 mètres carrés de surface de vente et 2500 références, dont 70% issues de la région Midi-Pyrénées.
Il aura réalisé sur 12 mois un chiffre d'affaires de 2 millions d'euros : moins que les 3 ou 4 millions d'euros attendus, mais l'ouverture quasi concomitante de deux concurrents mieux placés (dont un Grand Frais) a pris InVIvo de court.
Le second Frais d'Ici a été inauguré le 15 octobre 2015 à Chenôve, dans l'agglomération dijonnaise. 620 mètres carrés et 2400 produits, issus à 70% de Bourgogne ou Franche-Comté.
La promesse faite au client reste la même : un nouveau modèle de distribution, porté par des coopératives agricoles et proposant avant tout des produits de la région. Les photos des producteurs sont partout. On sait toujours, ou presque, de quelles communes viennent les spécialités.
Numéro un de la jardinerie
Premier groupe coopératif agricole français (5,7 milliards d'euros de CA), InVivo rassemble 223 coopératives. Son premier métier, pour faire simple, est de fournir à ces coopératives adhérentes semences, agrofournitures et nutrition animale.
Mais InVivo est aussi le numéro un français de la jardinerie. Son enseigne Gamm Vert (plus de 1050 magasins) est exploitée en franchise par les coopératives. Avec Frais d'Ici, le groupe leur offre l'opportunité de se diversifier dans la distribution alimentaire. Avec toujours la même légitimité : qui est mieux placé que des agriculteurs pour vendre des produits agricoles au public ?
À Portet-sur-Garonne, les coopératives engagées dans le projet Frais d'Ici en ont profité pour y proposer leurs propres productions, notamment en boucherie et charcuterie (bovins, canards gras, porcs).
À Chenôve, les deux coopératives impliquées aux côtés d'InVivo (les magasins pilotes ne sont pas encore des franchises) sont essentiellement céréalières. Hormis le pain, on ne retrouve donc pas grand-chose issu de leur propre production chez Frais d'Ici.
Difficilement compréhensible d'un point de vue client, ce paradoxe est en réalité peu visible. Personne ne fait le lien, en vérité, entre les noms des coopératives placardés à l'entrée et les produits en rayon.
"Le positionnement de Frais d'Ici, ce n'est pas de vendre les produits des coopératives, décode Jean-Pierre Dassieu, le directeur général d'InVivo Grand Public (la branche distribution du groupe). C'est de vendre les produits de la région." Esprit coopératif oblige, les fournisseurs référencés sont soit des producteurs en direct, soit des coopératives locales, non impliquées par ailleurs dans le projet.
"Tant qu'à se lancer dans la distribution, autant le faire comme ça, poursuit Jean-Pierre Dassieu. Les coopératives achètent l'histoire, c'est un positionnement qui nous fait tous vibrer."
Le plan de déploiement
Un troisième Frais d'Ici ouvrira durant l'été 2016 à Auch (32). Le magasin sera cette fois couplé à une vaste jardinerie Gamm Vert existante, sur laquelle 500 mètres carrés seront ponctionnés.
L'encaissement sera commun, pour limiter les coûts de gestion, mais les fonds de commerce seront distincts. Chaque enseigne aura sa propre entrée.
Vivadour, la coopérative franchisée Gamm Vert à Auch, était déjà impliquée dans l'ouverture du premier Frais d'ici à Portet-sur-Garonne (31).
"Une centaine de magasins Gamm Vert, situés dans des zones de chalandise très porteuses, pourraient facilement accueillir un Frais d'Ici accolé", calcule Jean-Pierre Dassieu, le directeur général d'InVivo Grand Public (la branche distribution du groupe).
En incluant des zones à 25.000 ou 30.000 habitants, comme à Auch, le potentiel grimpe même à 200 points de vente.
"On peut aussi imaginer de reconfigurer complètement des petits Gamm Vert en Frais d'Ici", ajoute le dirigeant.
Avec trois magasins pilotes (et peut-être un quatrième à Bordeaux, où le groupe mène des "recherches actives"), InVivo va se donner jusqu'à fin 2016 pour avoir des "idées claires" sur Frais d'Ici et lancer ensuite l'enseigne en franchise.
"Nous avons 80 coopératives très actives sur Gamm Vert, enchaîne Jean-Pierre Dassieu. La moitié d'entre elles peuvent être intéressées par la distribution alimentaire. Elles ont envie d'en découdre, elles ont les réseaux et parfois déjà les emplacements. Avec un tel levier, nous pensons atteindre rapidement, dans un premier temps, les 100 magasins."
